Libration de Becky Chambers

Je n’ai pas le sentiment que cela fasse plus d’une année que j’ai lu L’espace d’un an de Becky Chambers. Et pourtant l’horodatage sur le blog est sans appel… J’ai l’impression de l’avoir terminé il y a quelques semaines seulement. Et de m’être ainsi plongée dans Libration peu de temps après. Il n’en est rien mais ce ressenti démontre bien que ce livre m’a énormément marqué ; qu’il m’a même pour ainsi dire totalement habité. Il y a peu de livres qui m’ont fait cette sensation. Alors j’admets, je les bichonne et surtout je les conseille à tour de bras. Partout. Dès que l’occasion se présente. En parler, dire combien j’ai aimé, partager ma chronique. Aussi, il était temps. Temps que je poursuive dans l’univers des voyageurs de Becky Chambers avec Libration. C’est une suite sans en être une. Becky Chambers nous propose de retrouver des personnages du premier tome mais dans un tout autre univers pour raconter une toute autre histoire. Elle élargit notre horizon passant d’un vaisseau à une planète. Libration est un magnifique roman. J’ai adoré. Mais il reste néanmoins derrière son prédécesseur dans mon cœur de lectrice. Peut-être parce que ça n’est pas ma première lecture de l’autrice. Peut-être parce que L’espace d’un an est indétrônable. Je ne sais pas. Ce que je sais c’est que le côté doux, sentimental, émotionnel, profondément humain de la science-fiction de Becky Chambers me fait un bien fou. Alors lisez-là. Découvrez-là.

J’essaie toujours de faire très attention à ne pas « spoiler » une histoire. Toutefois, s’agissant d’une suite il m’est difficile de ne rien dévoiler, au risque sinon de ne pas faire de chronique du tout. J’ai tenté de ne rien divulguer d’important mais si vous souhaitez conserver une surprise complète, je vous invite à lire ma chronique qu’après votre lecture ! 🙂

Le dictionnaire Larousse nous apprend que la libration est un nom féminin qui signifie « Léger balancement du globe lunaire autour de son axe, que l’on perçoit depuis la Terre. (Il permet d’observer, de la Terre, environ 59 % de la surface lunaire.) / Oscillation d’un astre autour d’une position moyenne. » Et en effet, ça oscille dans ce roman de science-fiction.

Pour celleux qui ont lu L’espace d’un an nous retrouvons deux personnages : Poivre et Lovelace. La première est aperçue dans le précédent livre au détour d’une escale. Poivre est une tech. Autrement dit elle bidouille, répare, créée des objets divers et variés en lien avec la technologie. Elle tient une petite boutique avec Bleu, son compagnon, qui est aussi artiste peintre. Lovelace est l’intelligence artificielle du vaisseau de Ashby. Lovey. Elle a quitté le vaisseau au profit d’un kit. Autrement dit elle a intégré un corps synthétique et Poivre l’accueille en toute connaissance de cause. Ce type de transfert n’est pas ce qu’il y a de plus légal. Pourtant Poivre et Bleu n’hésitent pas à aider Lovelace, qui deviendra Sidra.

Et ça oscille.

Entre l’histoire de Poivre et l’avenir de Sidra. D’où vient Poivre ? Que faisait-elle avant d’être cette tech respectée ? C’est son passé qui se déroule sous nos yeux. Difficile d’en parler sans rien dévoiler mais Poivre nous impressionne. Elle nous en met plein la vue avec du courage à revendre, de l’intelligence, une volonté de fer et l’espoir chevillé au corps. Et puis sa générosité vis-à-vis de Bleu. Toute cette histoire nous permet de comprendre en quoi aider Sidra est si important pour Poivre.

Et ça oscille.

Pour savoir qui elles sont et répondre à cette question : Qui suis-je ? Quel est mon but ? Si Poivre l’a trouvée, il n’en va pas de même pour Sidra qui se retrouve confronter à des situations complexes que ses circuits peinent à gérer. Le kit lui semble inconfortable, insuffisant. Alors que l’on n’imagine pas qu’une vie libre puisse être moins bien qu’une vie limitée aux parois d’un vaisseau, Sidra nous démontre qu’il n’en est rien. Que l’univers qui nous plaît, qui nous parle, est celui dans lequel on parvient à évoluer avec aisance. Dans lequel on parvient à se sentir bien.

Ça oscille.

Pour savoir où est sa place dans ce monde en perpétuel mouvement. Ce monde qui évolue sans cesse, qui comporte son lot d’horreurs mais aussi de bonheur, de violence et de douceur. Un monde dans lequel on peut apprendre à faire confiance à un être totalement différent de soi-même. Un monde où on s’interroge de savoir si une intelligence artificielle ça n’est pas davantage qu’un réseau de fils et de connexions.

On oscille.

Entre l’agacement parfois vis-à-vis de l’attitude de Sidra et la bonté de Poivre. Entre l’envie de bien faire de l’IA et le côté un peu borné de Poivre. Entre les amours.

On oscille toujours avec beaucoup de douceur et de bienveillance. La plume de Becky Chambers est résolument emplie d’émotions mais aussi d’une farouche volonté d’apporter du plaisir au lecteur. C’est de la science-fiction délicate, pleine de sentiments mais porteuse également de nombreuses questions très philosophiques, notamment dans ce deuxième opus où le thème central est de savoir qui l’on est. Des thèmes généraux mais aussi transversaux. L’autrice nous montre que ces questions se poseraient de façon universelle. Il y est aussi question de tolérance et d’ouverture d’esprit. La relation entre Sidra et un autre personnage va jouer un rôle central dans l’évolution de l’IA. Et j’ai trouvé ses réactions si bien retranscrites. Le rejet, la colère de se sentir trahie, la curiosité, le respect… Toutes les émotions nous traversent tandis que nous découvrons le récit. Il n’est donc pas seulement question de science-fiction. Mais d’une histoire d’émotions.

A côté de ça, l’univers est toujours aussi incroyablement riche. Que ça soit l’environnement dans lequel évolue nos personnages, ou les particularités des différentes espèces évoluant autour d’eux, il y a une incroyable fluidité et cohérence de l’ensemble. On retrouve les bracelets, on découvre le système financier, un peu de gastronomie avec Poivre. On apprend les limites des tech et la façon dont communique certains êtres. Les rites, les festivités sont incroyables. J’ai eu, comme auparavant, l’impression d’entrer dans un monde que je connaissais déjà, dans lequel je suis la bienvenue.

Il vous suffit d’ouvrir ce livre pour franchir le seuil de cet univers incroyable que je vous invite à découvrir.

Bonne lecture,

Maêlle

 

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