Lancelot – Recueil de nouvelles édité chez ActuSF

   Lors d’un passage aux Utopiales l’année dernière, je me suis laissée tenter, entre autre, par un recueil de nouvelles édité chez ActuSF au titre prometteur : Lancelot. Je sais, vous allez me dire qu’il est ultra connu, qu’on en a déjà soupé de Lancelot dans les légendes arthuriennes. Justement, ce qui me plaisait c’est que le recueil n’avait comme fil rouge que Lancelot. Pas toute la légende, par Arthur, seulement le chevalier du Lac. J’étais intriguée de voir comment les neuf auteurs réunis allaient traiter de ce personnage pour lequel j’ai une préférence. Ce que j’aime chez Lancelot c’est le paradoxe qu’il porte en lui. Il est à la fois le plus grand chevalier de la table ronde, loyal, fidèle et en même temps il sera le félon, l’exilé, le traître. Il est aussi celui qui va aider un Roi, suivre la quête du Graal alors même qu’il a été élevé sous le lac par une fée. Il y avait donc matière à dire, à écrire, à imaginer. Je suis sortie un peu déçue de ma lecture…

lancelot

   La multitude d’auteurs présents dans un recueil de nouvelles nous laisse la possibilité de toujours en apprécier sur la totalité. Il est rare qu’aucune nouvelle ne nous plaise ou alors c’est que l’on s’est vraiment fourvoyé dans son choix ! Ici, on trouve des noms connus de la fantasy comme Anne Fakhouri, Jeanne-A Debats, Lionel Davoust, Nathalie Dau et Fabien Clavel. J’avoue que je ne connaissais pas ou peu Karim Berrouka (pour lequel vous pouvez lire l’article de Lintje au sujet de son livre Fées, weed & guillotine) Franck Ferric, Armand Cabasson et Thomas Geha.

   J’ai été parfois enthousiasmée, ai essuyé quelques déconvenues, je suis aussi parfois restée sur le bord de la page incapable de rentrer dans l’histoire. C’est donc une lecture inégale que j’ai eue. Mais je peux au moins faire un constat. A de rares exceptions près, tous les auteurs ont choisi de traiter le côté sombre de Lancelot et le moment de la légende le plus dur pour lui : son exil. Le traître qui aime la Reine Guenièvre, lui fait la cour, l’amour, l’adore et qui se verra condamné en conséquence à l’exil. Pour certains, Arthur savait et cautionnait, son mariage avec Guenièvre étant un mariage arrangé. Pour d’autre, Lancelot avait trahi son roi, celui auquel il avait prêté serment. J’ai vu peu d’auteurs s’aventurer sur la relation qui unissait Lancelot et Arthur, sur des combats héroïques qu’ils auraient mené ensemble tandis que Lancelot se meurt d’amour pour sa reine, son enfance sous le lac est presque passée sous silence autant que « la fin » de son exil. C’est pourtant une légende et non un fait historique. En cela elle laissait aux auteurs toute latitude pour adapter comme ils le souhaitaient. Et même si le fait était avéré, la fantasy permet au moins cela : partir loin, regarder d’un autre point de vue, imaginer autre chose, sortir des carcans. En cela, j’ai été un peu déçue de diverses façons que je vais tâcher de vous exposer.

   Le recueil s’ouvre avec la nouvelle de Nathalie Dau, Le donjon noir. Pleine de poésie et de douceur, j’ai été vite emporté par ce court récit qui a le mérite de parler de l’arrivée de Lancelot au sein de la cour d’Arthur. Une façon originale de lui faire rencontrer Guenièvre que j’ai trouvé bien exploitée. J’ai presque regretté que la nouvelle soit si courte… On continue avec Fabien Clavel et son Lancelot-dragon qui parle de la quête du Graal. Une quête fort complexe dans laquelle j’ai eu du mal à me plonger. Sombre, mystérieux, parfois alambiqué, le récit n’a pas su me convaincre. Pourtant la quête du Graal avait le mérite de souligner un autre passage important de la vie de Lancelot même si cela rappelle peu ou proue son exil… Le meilleur d’entre eux de Lionel Davoust ne démérite pas et peut-être parce qu’elle fut la première a vraiment parler de la traîtrise de Lancelot, je lui ai réservée un bon accueil. Bien écrite et dynamique, l’histoire a su m’intéresser. On poursuit toujours sur la traîtrise et l’exil de Lancelot avec Le vœu d’oubli d’Armand Cabasson. Une façon originale de traiter le sujet qui souffre de quelques maladresses dans l’écriture mais globalement sympathique. Néanmoins, ça m’a paru redondant puisqu’il se situe… Après la traîtrise et l’exil de Lancelot. J’ai été totalement déçue de celle d’Anne Fakhouri, Je crois que chevalerie y sera. L’auteur choisit de faire appel à ses propres récits en faisant allusion à La brume des jours dont je n’ai pas compris la signification ni le rôle dans l’histoire. Du reste, le récit entier m’a paru totalement opaque, sans queue, ni tête. Ce sera la première nouvelle où sera citée le nom de baptême de Lancelot, Galaad mais qui se situe durant l’exil de Lancelot (je serai tentée de dire « encore »). Mais pour celle-ci, je suis restée totalement hors du récit. Dommage car il est un des plus longs du recueil. J’ai découvert Thomas Geha avec sa nouvelle La tête qui crachait des dragons. J’espérais être emportée après une lecture laborieuse mais ça ne fut pas le cas. L’univers sombre, glauque et un peu pourrissant de l’auteur n’a pas su me captiver. Pas mal mais sans plus, on en revient à Lancelot en exil… Mon enthousiasme a commencé à s’émousser. Mais Franck Ferric avec Les gens de pierre a su l’aiguiser à nouveau. Il traite le sujet d’une façon tout à fait original. Je ne peux pas en dire beaucoup plus au risque de révéler ce que l’on découvre au gré du récit. Mais mêlant Lancelot avec une autre histoire, se plaçant dans un tout autre point de vue, il a su me ravir. Et cela a continué par la suite avec Jeanne-A Debats qui m’a fait beaucoup rire avec son vampire. Elle choisit l’originalité, elle ose mêler son vampire Raphaël (dont je n’ai pas lu les aventures) à Lancelot. Elle embarque le légendaire chevalier dans une quête totalement déjantée, le tout en 1936. J’ai tout aimé, l’idée, le style d’écriture, les personnages. L’auteur brise l’image d’angelot de Lancelot pour en faire un chevalier parfois benêt, exagérant ses traits comme la piété à l’extrême. Je me suis régalée et ai passé un très bon moment presque un peu long avec les 70 pages que fait Lance. Le recueil se termine avec Karim Berrouka dont je découvrais la plume avec sa nouvelle Pourquoi dans les bois aimé-je m’égarer… Présenté comme un auteur déjanté, je ne peux que confirmer. Son univers est absolument truculent, décalé et génial. Les personnages de Marc-Aurèle, détective, l’inspecteur Petiot, Bugnard et Premier de la Classe sont aussi caricaturaux que drôles. Malgré le format court de la nouvelle je me suis un peu attachée à ce fameux Marc-Aurèle et la lecture de la nouvelle m’a donné envie de découvrir son livre. Ici, le Lancelot est à l’image de l’auteur… Totalement déjanté. C’est indescriptible mais indéniablement drôle. On frise le burlesque, il faut aimer l’humour à toutes les pages et le côté décalé. L’idée d’utiliser des acronymes connus comme BCE pour les détourner de leur sens m’a beaucoup plu. J’aimerai bien intégré la Brigade des Crimes Extrêmes. Là encore, vous l’aurez compris Lancelot a le droit à un traitement tout à fait nouveau et surprenant. Mais justement, c’est ce qui m’a plu !

   Comme vous pouvez le constater, j’ai connu un certain désamour avant de terminer sur une excellente note. Le personnage éculé de Lancelot méritait d’être dépoussiéré, bousculé et j’ai apprécié les auteurs qui se sont lancés ce défi comme Jeanne-A Debats ou Karim Berrouka. Les autres, plus classiques ne tiennent pas toujours leur promesse, en offrant un traitement parfois « trop » classique justement.

   C’est donc un article en demi-teinte reflétant le ressenti que j’ai eu après ma lecture. Néanmoins certaines nouvelles valent le détour, aussi je ne peux que vous le conseiller car elles vous permettront de découvrir leurs auteurs.

Bonne lecture !

3 réflexions sur “Lancelot – Recueil de nouvelles édité chez ActuSF

  1. Lintje 16 mars 2015 / 15 h 19 min

    Dommages pour certains auteurs comme À. fakhouri que l’on a su aimer à d’autres occasions. Pour Berrouka ça a été une belle découverte pour moi aussi. Ça me plairait de découvrir sa nouvelle. Je te l’emprunterai 🙂

    • Maêlle 17 mars 2015 / 9 h 51 min

      Oui, j’ai été aussi très déçue dans la mesure où j’ai déjà eu l’occasion de la lire et que j’avais apprécié. Contrairement à d’autres, je pense que ce qui pêche c’est que lorsqu’on n’a pas lu La Brume des jours, on comprend mal la symbolique pour ne pas dire pas du tout. Et on passe à côté. Alors que Debats ou Berrouka ont su user de leurs personnages tout en intégrant un lecteur novice qui n’aurait jamais lu leur livre. C’est avec plaisir que je te le prêterai 🙂

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